Les années 1950 en France, connurent la vogue des perles colorées de Bohème, favorisée par le succès des bijoux Christian Dior. Décoratifs et opulents, ceux-ci marquaient un retour à la géométrie et à la clarté, remettant à l’honneur le verre taillé. Depuis, le temps a passé, et ces magnifiques perles connaissent des hauts et des bas, suivant en cela toujours les modes imposées par les créateurs.
Cependant, au-delà de nos frontières, les perles de Bohème que l’on trouve en République Tchèque, jouissent d’un renom international, au même titre que celles de Venise. Les verriers tchèques sont très inventifs, surtout dans la fabrication des perles à facettes, et présentent des styles très différents, pleins de fantaisie, comme l’imitation de gemmes ou les gros « bonbons » en verre coloré. Leur maîtrise des finitions, des incrustations de métaux précieux et du verre mosaïqué, leur permet de soutenir la compétition avec Venise, la Reine d’entre toutes les villes verrières. En dépit d’une création incessante de nouveaux modèles, nombre d’anciens modèles sont toujours d’actualité. Les perles tchèques n’ont rien perdu de leur prestige.
En remontant dans le temps, rappelons-nous que le territoire de la République Tchèque recouvre l’ancien royaume de Bohème. Au cours de son histoire, il est passé sous le contrôle de nombreuses puissances : annexé par le Saint Empire en 1355, il fut soumis à la dynastie des Habsbourg à partir de 1526. En dépit de ces dominations successives, La Bohème sut préserver une identité culturelle forte.
Des fouilles archéologiques récentes attestent que l’industrie du verre a commencé dans cette région dès le début du XIVè siècle. Grâce à leurs sous-sols riches en minéraux et aux ressources en bois qui alimentaient les hauts-fourneaux. La Bohème, comme la Bavière, sa voisine, réunissaient les conditions idéales pour que s’y développe une industrie verrière. Cette activité reposait sur de petits artisans ruraux qui, munis de simples moules et d’une lampe à gaz, assuraient l’essentiel de la production de perles de Bohème. A partir de 1945, les choses changèrent, car le régime communiste nationalisa les verreries, qui devinrent l’immense complexe d’État Jablonex, qui exporta et exporte encore aujourd’hui dans le monde entier. Ce n’est que récemment que les petites verreries privées peuvent se développer à nouveau.
Ceci permet de comprendre pourquoi il est difficile à tout un chacun de trouver des perles au détail dans Prague. Nous avons été renseignés par une jeune femme tchèque, qui se rendait régulièrement pour faire ses courses au marché Havel (cf article précédent) et qui avait aperçu, par hasard, ces vendeurs de perles au détail. Quelle chance !